Transition énergétique Québec
Révision du plan directeur 2018-2023
Mesures proposées par le Groupe d’initiatives et de recherches appliquées au milieu (GIRAM), membre du regroupement Stratégies énergétiques.
Pour fin d’analyse à la Régie de l’énergie du Québec
PROPOSITION AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE (les numéros font référence à l’annexe VI du document TÉQ)
Proposition 1: Réaliser les études conceptuelles et de préfaisabilité requises sur une alternative de transport collectif au troisième lien voitures entre Québec et Lévis et projeter sa réalisation potentielle d’ici 2030
Cette proposition concerne les mesures 1 et 2 (2.1-2.2) de l’aménagement du territoire et les mesures 13 et 14 (14.1-14.2) du transport de personnes du plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques du Québec 2018-2023.
Le gouvernement québécois nouvellement élu a demandé au Bureau de projet du 3e lien de planifier un lien routier entre Lévis et Québec, à l’est du territoire urbanisé, aboutissant à la pointe ouest de l’ile d’Orléans et sur la côte de Beauport dans le secteur de l’autoroute Félix-Leclerc (440). Cette décision de planifier un troisième lien routier, sans études globales sur la meilleure localisation et sur les besoins en transport collectif entre les deux rives de la région métropolitaine de Québec, va à l’encontre de l’objectifs de réduire l’apport en pétrole et la diminution de la contribution en GES issue du transport des personnes de 5 % d’ici 2023 et de 40 % d’ici 2030.
En choisissant le corridor le plus à l’est de l’agglomération urbaine, sans étude exhaustive, l’infrastructure prévue risque d’aboutir sur des voies rapides (autoroutes Félix-Leclerc et Dufferin-Montmorency) déjà congestionnées aux heures de pointes du matin et du soir et sera la plus décentrée par rapport au flux quotidien de navetteurs entre les deux rives[1].
Ce projet, modelé sur une vision du XXe siècle, provoquera une intensification de l’utilisation de l’automobile et du transport individuel, ne règlera pas à moyen terme le problème de congestion routière entre les deux rives et entraînera une progression de l’étalement urbain. De plus, le type de développement résidentiel qu’il favorisera va à l’encontre de la mise en place d’un transport collectif rentable et durable. D’ailleurs plusieurs spécialistes[2] américains, canadiens ou québécois soulignent qu’au bout de quelques années, on retrouvera le niveau de congestion antérieur à la construction de cette nouvelle infrastructure. Selon ces experts, la réduction des bouchons de circulation sur les routes passe par une panoplie de solutions : des transports collectifs efficaces, du covoiturage, du transport actif (vélo et marche), la densification des quartiers, un rapprochement habitation-travail, une modification des horaires de travail, etc.
Même si dans ce projet, on planifiait une voie pour les tramways pour se raccorder au projet de transport structurant de Québec, plusieurs spécialistes québécois[3] prétendent que le lien routier ferait concurrence au transport en commun et le défavoriserait. De plus, un projet à l’extrême est du territoire (axe route Lallemand-île d’Orléans-Beauport) se trouve en périphérie des concentrations de populations urbaines susceptibles d’adopter le transport collectif.
Déjà, dans la région de la Communauté métropolitaine de Québec (CUQ), la part des déplacements domicile-travail des conducteurs solo en véhicules-automobiles ou camions légers a augmenté entre 2006 et 2016, passant de 74,8 % à 76,3 %[4]. Durant la même période, le nombre de passagers dans ces véhicules a diminué, passant de 5,5 % à 3,9 %. Il va de soi qu’un autre lien autoroutier entre les deux rives maintiendra cette part modale d’environ 80 % des navettes pour le travail sur le territoire de la CMQ. La seule différence, dans l’avenir, sera l’utilisation d’un nombre accru de véhicules hybrides ou électriques.
Phase 1 : Créer un troisième lien sous forme de tunnel reliant les centres-villes de Lévis et de Québec exclusivement pour le transport des passagers vise justement à contrer cette prédominance de l’auto-solo ou du moins l’abaisser considérablement au cours des prochaines décennies et de diminuer de façon significative la consommation d’hydrocarbures du secteur des transports dans l’agglomération de Québec.
Ce lien sous-fluvial, d’environ 6 kilomètres, creusé par un tunnelier à partir de l’autoroute Jean-Lesage (20) et aboutissant dans la Basse-Ville de Québec (figure 1, corridor 4, mais trajectoire plus à l’ouest à Québec) permettrait à cet axe de transport collectif de se raccorder au pôle Saint-Roch du projet de transport structurant basé sur un réseau de tramway et d’autobus électriques articulés du côté de la Rive-Nord. Annoncé en mars 2018, ce projet structurant de la Ville de Québec comportera notamment, « une ligne de tramway de 23 kilomètres, une ligne de transbus de 17 kilomètres, 16 kilomètres d’infrastructures réservées au transport en commun et 110 kilomètres de Métrobus »[5].
À la limite sud du tracé (bordure sud de l’autoroute), un stationnement incitatif serait créé pour les navetteurs des secteurs de la périphérie urbaine et en direction nord des accès souterrains style métro pourraient être aménagé dans les lieux stratégiques d’affluence, tels boulevard Guillaume-Couture (Galeries Chagnon et Cité Desjardins) et une autre desservant les secteurs du Vieux-Lévis et de la Traverse.
Selon l’étude de 2016 de l’ingénieur Benoît Massicotte de l’école Polytechnique de Montréal, la réalisation de deux tunnels de 7,8 kilomètres et frais connexes, à l’est, dans l’axe de l’île d’Orléans couteraient environ 3, 988 milliards $[6], sans compter les coûts de maintenance. Dans le cas d’un lien souterrain interrives pour deux voies de tramway, un seul tunnel moins large que 15,1 m serait suffisant, ce qui réduirait les coûts. Au total, avec l’aménagement de quatre à cinq stations d’accès, le projet qui pourrait se réaliser pour environ 2,0 milliards $.
La mise en œuvre de ce lien de transport souterrain et son raccordement au réseau structurant de la Rive-Nord, jumelée à une traversée du tramway sur le pont de Québec à l’ouest, aurait pour effet positif d’intégrer les réseaux de transport en commun entre Québec et Lévis et, conséquemment, d’entrainer une diminution significative du nombre d’usagers auto pour le travail et les loisirs dans l’agglomération urbaine de Québec. En 2017, les débits journaliers moyens annuels du pont Pierre-Laporte et du pont de Québec étaient respectivement de
127 000 et 32 000 véhicules[7]. Une diminution de 10 % sur cinq ans de ce nombre moyen journalier de voitures, soit 15 900 représenterait une réduction de 23 850 000 litres d’essence durant cette même période, tout en réduisant les GES d’environ 40 000 tonnes Éq Co2. De plus, les dépenses brutes des ménages allouées au transport diminueraient considérablement (une voiture coûte environ 7 000 $ par an) pour toutes les familles qui délaisseraient le transport auto ou se restreindraient à la possession d’une seule voiture au lieu de deux.
Phase 2 : Un projet de tramway dans un axe est-ouest à Lévis, entre le cégep Lévis-Lauzon et le Carrefour Saint-Romuald (pont de Québec), soit une distance d’environ 18 kilomètres dans l’axe du boulevard Guillaume-Couture.
En calculant un coût moyen de 35 millions $ par kilomètre (voir encadré sur Besançon), on extrapole le coût à environ 630 millions $, sans compter les frais de réaménagement de la traversée du tramway sur le pont de Québec. Donc, pour environ 2,630 milliards $, soit beaucoup moins que l’évaluation des couts de 2016 du tunnel routier à l’est. Sans compter que plusieurs estiment que ce dernier projet pourra atteindre 7 à 8 milliards $, s’il se concrétise d’ici 2030.
Un exemple récent : Besançon, un projet exemplaire
-Le 30 août 2014, l’agglomération de Besançon (180 000 hab.) a inauguré un tramway de 14,5 kilomètres.
-Cout total : 228 000 d’euros, soit 17 millions d’euros du kilomètre, alors que le coût moyen habituel est d’environ 25 millions d’euros le kilomètre.
-Raisons des coûts moindres : des tramways de 23 mètres au lieu des standards de 34 mètres et une gestion très serrée du projet par les élus, plus particulièrement le maire, Jean-Louis Fousseret.
-Avantage du tramway sur le bus : un tramway a une durée de vie de 30 à 40 ans, alors que les système par bus ont une longévité d’environ 15 ans.
-« Un tramway est un mode de transport tourné vers l’avenir et la modernité. C’est électrique, plus calme, plus silencieux, cela démarre et freine doucement. C’est plus convivial » (le maire de Besançon).
Cette proposition d’un circuit périphérique axé sur un tramway interrives représente une solution d’avenir puisqu’il mise sur un développement du transport collectif dans une optique de diminution de l’usage des voitures et du fait même d’une réduction de la congestion et des GES liés au transport.
De plus, sur le territoire lévisien, cette ligne de tramway serait un trait d’union entre les quartiers et favoriserait une densification en bordure et sur le pourtour du boulevard Guillaume-Couture, épine dorsale de la nouvelle ville de Lévis. La structuration résidentielle et commerciale sur cet axe contrerait l’étalement urbain et rentabiliserait davantage à long terme le réseau de transport collectif. Enfin, il contribuerait également à désengorger l’autoroute Jean-Lesage, aux heures du début et de la fin des journées de travail.
En misant sur cette artère de transport en commun périphérique, ceinturant les zones centrales de l’agglomération et à proximité des principales zones d’emploi et éducatives, on éviterait pour quelques décennies la construction d’un nouveau lien routier au-dessus ou sous le fleuve tout en faisant un choix plus porteur sur le plan environnemental et plus économique. Cela constituerait vraiment un virage dans l’agglomération par rapport au « tout pour l’auto » qui persiste depuis les années 1960 dans la région.
Proposition 2: Création d’une agence de transport dans la région de Québec et plus spécifiquement pour favoriser la mise en œuvre par les autorités municipales d’un plan métropolitain de mobilité durable
Cette proposition concerne la mesure 2.1 (soutenir la réalisation de plans de mobilité durable intégrés) du volet de l’aménagement du territoire du plan directeur de TÉQ.
Jusqu’à maintenant la région métropolitaine de Québec n’a pas réussi à planifier le transport collectif avec une vision de l’ensemble du territoire. Chaque ville, a sa propre société de transport (Société de transport de la Capitale et Société de transport de Lévis) et aucune instance régionale dédiée au transport des personnes n’existe présentement. Certes, dans le projet de Service rapide par bus (SRB), les deux Villes étaient en communication, mais depuis l’abandon de la participation de la Ville de Lévis au projet, sous prétexte des trop grands coûts prévus, chaque rive développe ses propres projets, sans même se préoccuper d’interconnexion, comme le démontre la Ville de Québec avec son projet structurant[8] (tramways et transbus) dévoilé le 16 mars 2018.
Pendant que Québec va de l’avant avec son projet de réseau structurant, basé sur le tramway et les transbus, Lévis a crée en 2018 un « Comité sur la mobilité durable » axé sur l’aménagement de voies axiales et surtout sur l’espoir de la concrétisation d’un troisième lien routier à l’est. Pourtant, à Lévis, ville en croissance de 145 000 habitants, ces solutions ne semblent pas viables pour régler les problèmes à long terme dans une optique de mobilité durable des personnes.
Pour toutes ces raisons, la création d’une Agence de transport régionale ou d’une Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), comme celle qui a été créé dans l’agglomération urbaine montréalaise (1e juin 2017), s’avère nécessaire et urgente afin de planifier les futurs investissements en transport collectif selon une vision globale qui tient compte des besoins actuels et futurs.
Les objectifs[9] qui ont prévalu pour la création de l’ARTM devraient être les mêmes pour la création d’un organisme dédié à la mobilité durable dans la région de Québec, notamment :
1° définir une vision cohérente et à long terme des services de transport collectif, de leur amélioration et de leur développement;
2° assurer une planification adéquate et optimale de ces services en les coordonnant et en favorisant les meilleures pratiques en cette matière, notamment en tenant compte des principes de développement durable, afin d’accroître l’efficience et l’efficacité́ des différents réseaux de transport;
3° favoriser et simplifier l’accès aux différents services pour les usagers, incluant ceux à mobilité́ réduite, en misant sur l’intermodalité et en assurant l’intégration tarifaire;
4° faciliter la collaboration et la cohésion entre les différents intervenants en matière de transport collectif et les municipalités locales;
5° favoriser la diminution de l’empreinte carbone.
Dans la région de Québec, à la suite du cafouillage dans le projet SRB et les tensions entre les deux maires qui ont suivi, cette instance chargée de réaliser des plans stratégiques de transports des personnes selon une vision à long terme, parait absolument requise.
La responsabilité de l’initiative devrait relever du ministère de la Mobilité durable, des Transports et de l’Électrification des transports (MMDTÉ).
Propositions d’étude
ÉLECTRIFICATION DES TRANSPORTS
Mesures 6 et 7 du volet Transport routier de l’annexe VI (Réaliser une étude exhaustive sur l’utilisation d’outils économiques pour favoriser l’adoption de comportements éco-énergétiques ou pour contribuer au financement de la transition énergétique (TEQ) et Poursuivre les efforts en électrification) du Plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques du Québec 2018 – 2023
Mise en contexte
Pour atteindre les objectifs de réduction de l’utilisation du pétrole et, du coup, de la diminution de la principale source GES d’ici 2023 (5 %) ou 2030 (40%), il faut l’application de mesures radicales afin de provoquer des changements de comportements ou des modes d’utilisations différents de la part des consommateurs, tant pour le transport des marchandises que des personnes. Selon l’État de l’énergie au Québec, 2019 (HEC)[10], en 2016, les produits pétroliers raffinés consommés au Québec représentaient 693,6 Pj, soit 40 % du total (1 734 Pj), toutes provenances confondues de la consommation énergétique du Québec. Le secteur des transports (30 % de l’énergie consommée au Québec) est alimentée encore à 97 % en produits pétroliers raffinés (526 Pj), pourcentage qui ne semble pas fléchir pour l’alimentation en carburants des véhicules routiers de tous gabarits et dans une proportion moindre des véhicules hors route de type récréatifs ou autres (environ 5 %).
« En 2017, la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) dénombrait 6,55 millions de véhicules en circulation au Québec, dont 4,98 millions de véhicules de promenade (voitures, camions légers incluant les véhicules utilitaires sport (VUS), motocyclettes et habitations motorisées). De 1990 à 2016, le parc de véhicules personnel au Québec a augmenté de 59 %, soit une hausse près de trois fois plus importante que la croissance démographique de la province (19 %). Les catégories de véhicules qui ont connu la plus forte progression durant cette période sont les camions légers pour passagers (262 %) et les camions légers destinés au transport des marchandises (253 %) » [11].
Depuis 2015, il se vend moins de voitures régulières (moins lourdes et moins énergivores) par rapport aux minifourgonnettes, de camions légers et de VUS. Conséquemment, en 2017, les Québécois ont dépensé 12 milliards $ pour ces derniers véhicules, par rapport à 5,4 milliards $ pour des voitures. De plus, le nombre d’unités de véhicules vendus chaque année continue de croître et l’utilisation de l’usage d’un véhicule privé pour le travail se maintient à un taux de 78 %, selon l’Institut de la statistique du Québec.
La diminution de l’apport du pétrole au Québec passe prioritairement par des mesures efficaces dans ce secteur le plus néfaste pour la balance commerciale[12] (véhicules et pétrole sont importés) et pour le bilan des GES au Québec. En effet, on estime que la consommation de produits pétroliers représente environ 55 % des émissions de GES émis au Québec; toute transition énergétique réussie nécessite une baisse drastique de la réduction de cette source énergétique, surtout utilisée dans des modes de déplacements liés principalement au transport individuel.
Fait encourageant, les données des 20 dernières années semblent indiquer une certaine baisse de consommation des véhicules particuliers, notamment en raison d’avancées techniques réalisées par les grands constructeurs automobiles qui ont amené une amélioration de l’efficacité énergétique. Mais la popularité croissante des camions légers et des VUS chez les usagers québécois a annihilé tous les progrès amorcés dans la réduction des GES. Entre 1990 et 2016, les ventes d’essence ont progressé de 33 % et, entre 2013 et 2017, la progression a été de 12,7%[13]. Si cette tendance se maintient l’objectif de réduction de 40 % des produits pétroliers devient de plus en plus inatteignable.
Conséquemment, il devient urgent de mettre en œuvre des mesures favorisant l’électrification croissante des moyens de transports collectifs et individuels, y compris les équipements de nature récréative, tels les motoneiges, les motomarines, les motocyclettes et vélos. Il faut également, comme société soucieuse de faire sa part contre les GES, viser à contrer ce phénomène inquiétant de la popularité débridée pour les camions légers et les VUS.
Enfin, il y a lieu, compte tenu des ressources et de l’expertise au Québec, de promouvoir et soutenir financièrement toutes initiatives favorables à la fabrication en sol québécois d’un véhicule de promenade pouvant être vendu à un prix plus bas que ce qu’offrent actuellement les grands manufacturiers. Des mesures incitatives et d’encouragement d’électrification devraient également être destinées à la fabrication de véhicules utilitaires à vocation commerciale, ainsi qu’à une gamme variée de petits véhicules à vocation récréative.
Proposition 1: Remplacement graduel du parc thermique grand public
par l’automobile électrique, notamment en prolongeant la subvention de
8 000 $, au delà du 31 décembre 2020, soit au 31 décembre 2023.
Un parc automobile tout électrique en lente progression
Selon l’association des véhicules électriques du Québec (AVEQ), le Québec comptait au 30 novembre 2018 un total de 38 080 véhicules électriques,[14] ce qui représente 0,8 % du total du parc de véhicules immatriculés. Ce taux augmente constamment surtout depuis 2017. Le 31 mars 2018, on comptait un total de 24 422 véhicules rechargeables (11 135 véhicules entièrement électriques, 13 308 hybrides rechargeables et 120 motos ou motocyclettes électriques)[15].
L’objectif du Québec est de mettre 100 000 véhicules électriques sur les routes d’ici à 2020 semble accessible, notamment grâce aux subventions d’un maximum de 8 000 $ à l’achat et à une sensibilisation plus grande de la part de certains consommateurs. Si plusieurs acheteurs potentiels déplorent le manque de disponibilité et de choix dans les véhicules électriques ou hybrides rechargeables, il est possible que l’adoption par le gouvernement du Québec de la norme Zéro émission établie depuis janvier 2018 incite les fabricants à produire davantage de véhicules à faibles émissions et même nulles par un système de crédits. D’après le spécialiste, Daniel Breton, cette norme, devenue loi, doit être renforcée par son financement via le Fonds vert.
Un article récent[16] démontre l’influence positive des subventions sur les acheteurs de voitures électriques. L’objectif canadien de 500 000 voitures électriques à la fin de 2018 n’a pas été atteint, car à peine 100 000 voitures de ce type sont présentement en circulation. La grande majorité d’entre elles roulent au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique, les seules provinces ayant mis de l’avant un programme incitatif d’achat.
Proposition 2 : Pour contrer la tendance à l’achat de véhicules de plus en plus énergivores, par les particuliers (camions légers, camionnettes, VUS).
2.1 : Imposer une charge à verser au Fonds vert ou à Transition énergétique du Québec en fonction du poids et du cylindré du véhicule (les entreprises commerciales et agricoles ne seraient pas concernées par cette mesure).
Sans l’application de mesures répulsives à l’achat de véhicules particuliers lourds et peu économiques sur le plan énergétique, la tendance actuelle se poursuivra et ne permettra pas d’atteindre les objectifs prévus. Si on ne peut freiner de façon efficace la croissance continue du parc d’automobiles, il faut à tout le moins pouvoir davantage orienter les achats vers le segment du marché des véhicules électriques ou hybrides rechargeables d’ici 2030 ou 2035.
Comme on l’a souligné précédemment, depuis 2015, la croissance des ventes de VUS dépasse celle des autos, soit une augmentation de 246 % depuis 1990 contre une diminution de 28 % des ventes de véhicules de promenade. Il s’agit là du problème majeur de la consommation énergétique en transport des personnes et cette tendance semble grandement soutenue par le marketing publicitaire et la mode.
Pour les milieux ruraux ou périurbains, la voiture hybride rechargeable peut être un choix qui mérite d’être encouragé en attendant une plus grande disponibilité géographique des bornes de recharge et l’avènement de voitures électriques moins chères et plus autonomes.
On l’a mentionné plus haut, le Québec compte presque autant d’hybrides que de tout électriques dans son parc renouvelable de transport, soit 54 % d’hybrides rechargeables et 46 % de tout électriques[17]. Selon Pierre Langlois, « une voiture hybride rechargeable (« Plug-in hybrid ») ayant une batterie de 18,4 kWh,comme celle de la Chevrolet Volt, lui donnant une autonomie électrique de 85 km, selon l’EPA[18]. La moyenne de puissance d’une batterie d’auto électrique est de 43 kWh. Pour des batteries de 60 kWh, on obtient une autonomie de 380 km avec la Chevrolet Bolt et 480 km avec une batterie de 90 kWh (Tesla S).
Avec l’hybride, le thermique ne sert plus que de support à la motorisation, il supplée une énergie manquante de manière conjoncturelle. Quand le stockage électrique aura atteint son plein potentiel, en termes de batteries performantes, il disparaitra graduellement.
L’énorme avantage des véhicules hybrides rechargeables, c’est qu’ils ont une petite batterie qui n’a pas besoin d’une capacité supérieure à 20 kWh, comparativement à une voiture comme la Tesla Model S 100 qui a une batterie de 100 kWh. Donc, tous les problèmes potentiels liés à la batterie sont réduits de beaucoup.
Pourtant, on peut aller, occasionnellement, aussi loin qu’on veut, en faisant le plein de carburant. Et avec des biocarburants de 2e et 3e génération, qui n’utilisent pas de culture dédiée, mais de l’air de l’eau de l’énergie renouvelable et des déchets, on élimine le pétrole. Surtout que de nouveaux moteurs thermiques, jusqu’à 2 fois plus efficients, s’en viennent[19].
Enfin, mentionnons enfin un avantage méconnu supplémentaire du VÉ au plan de la pollution atmosphérique : l’absence de particules de freinage. « (…) le freinage d’un véhicule électrique étant en grande partie effectuée par le moteur électrique, ses freins durent généralement de 3 à 10 fois plus longtemps que les freins d’un véhicule conventionnel. Les émissions de particules fines des freins d’un véhicule électrique sont donc globalement de 3 à 10 fois moindres que celles d’un véhicule à essence »[20].
2.2 Agir contre une publicité omniprésente sur les écrans et dans les médias en faveur des voitures énergivores, camions légers et VUS.
La publicité vend avant tout du rêve. Quel que soit le contexte économique, favorable ou peu favorable, quel que soit le besoin réel du consommateur ciblé, pour réussir, la publicité va oublier la logique et les barrières financières de ce dernier en faisant d’abord appel à son émotion, au rêve et au sentiment universel de liberté. C’est essentiellement sur ce principe qu’est basée la publicité sur le camion léger et le VUS. Au Québec, l’industrie automobile consacre un budget publicitaire annuel de près de 500 millions $. Ces millions $ sont prioritairement consacrés à la promotion des camions légers et VUS.
Peut-on agir sur ce plan? Pour contrer les affres de l’industrie du tabac sur la santé, une des mesures les plus efficaces aura été de réglementer la promotion du produit. Instituée il y a déjà trente ans, cette réglementation s’est finalement avérée d’une très grande efficacité. Selon la loi québécoise, toute publicité en faveur d’une marque ou d’un fabricant sont interdites ou font l’objet de restrictions. Les commandites axées sur le produit sont également interdites.
Réglementer la publicité est une opération complexe. Un comité de parlementaires est actuellement à l’œuvre à Ottawa sur la question de la réglementation de la publicité touchant certains aliments et boissons. Le gouvernement du Québec ferait preuve d’audace en allant dans une telle direction. Toutefois, comme première étape, TEQ doit créer un comité d’experts pour en évaluer la faisabilité sur les plans légal et politique.
D’autre part, on convient qu’il y a un important déséquilibre entre les moyens publicitaires des constructeurs automobiles et ceux des acteurs de la mobilité durable. L’industrie ne fait actuellement que très peu de place au segment de la voiture hybride et électrique dans ses publicités. Ceci en raison de la faible disponibilité des voitures liée à la faiblesse de la demande. Pour briser ce déséquilibre, il est proposé que dès 2019, Transition énergétique Québec développe sa propre stratégie marketing grand public en faveur de la voiture hybride et électrique.
Proposition 3 : En vue de réduire leur utilisation, resserrer la réglementation sur les moteurs deux temps et encourager l’innovation en matière de véhicules récréatifs électriques (motoneiges, moto-marines, vélos électriques, etc).
L’emploi du moteur à deux temps est très onéreux dans le bilan carbone au Québec. « Les moteurs scooter 50 cc ont des émissions polluantes 1 000 fois supérieures à une voiture diésel ou essence récente » selon un institut de recherche français[21]. Ces moteurs se retrouvent majoritairement en milieu urbain, ce qui concentre davantage la pollution. Il est temps que le Québec commence à encadrer la réglementation à ce chapitre.
Par ailleurs, chef de file en matière d’industrie du véhicule récréatif, le Québec est bien placé pour paver la voie à l’innovation. Il existe déjà en sol québécois, un fabricant de motoneige électrique (Taïga Motors). Son produit affiche des performances égales à celles des engins bruyants et polluants équipés de moteurs deux temps. « L’idée mijote dans la tête du conseiller en tourisme Jean-Michel Perron depuis quelques années déjà : celle que le Québec devienne la première destination mondiale en motoneige électrique. « On dit qu’on est les champions de l’électricité. Il serait temps qu’on le prouve, et ça pourrait passer par la motoneige électrique », croit M. Perron. Cette activité pourrait atteindre des segments de marchés actuellement réfractaires à la motoneige traditionnelle.[22]
Proposition 4. Encourager l’établissement d’une industrie québécoise de production de véhicules électriques
Comme il est souligné dans le plan d’action gouvernemental en électrification des transports 2015-2020, Propulser le Québec par l’électricité, le territoire québécois a la chance de disposer d’une énergie propre disponible en grande quantité et à un cout concurrentiel. Bien qu’on exprime le souhait dans ce document que le Québec, en 2020, soit « un chef de file de l’utilisation des moyens de transports propulsés par l’électricité et un précurseur en matière de mobilité durable »[23], on est encore très loin de cet objectif à un an de l’échéance fixé.
En plus de posséder les ressources hydroélectriques et minières indispensables à l’électrification des transports, le Québec possède déjà une filière industrielle d’envergure liée de près ou de loin à ce secteur qui pourrait être mise à contribution dans le domaine de la fabrication.
Un modèle d’industrie québécoise du véhicule électrique pourrait s’établir avec une participation étatique, ce qui aurait le très grand avantage de prendre en compte des paramètres autres que la performance et la mode dans le produit. Des types spécifiques de véhicules pourraient être construits pour des usages et des contextes précis, ce qui ne se fait pas systématiquement dans l’industrie mondiale actuelle. On pourrait réinventer la petite voiture, par exemple, pour l’usage urbain ou de proximité, tel le navettage au travail.
En Chine, la filiale de GM SAIC-GM-Wuling Automobile a lancé la Baojun E100, qui, à 6 700 $, coûte deux fois moins cher que la Chevrolet Spark. Le modèle est réservé exclusivement au marché chinois. C’est une mini-auto à deux occupants. Elle offre des « performances très convenables pour un milieu urbain »[24].
Le Québec aurait tout avantage à investir cette niche très particulière, en produisant sa version du véhicule automobile électrique, en convertissant ses divers investissements actuels en haute technologie du transport aéronautique vers ce secteur du transport qui répond davantage à sa mission économique et sociale. De grands joueurs comme Bombardier, Hydro-Québec et les nouvelles minières comme Nemaska Lithium, voire l’aluminerie Rio Tinto, pourraient efficacement contribuer à une telle entreprise. Il s’agit d’une orientation très différente que de vouloir s’inscrire dans le paysage industriel mondial de la construction de voitures à combustion interne.
Comme le précise bien le Plan d’action en électrification des transports 2015-2020, la fabrication de composantes d’autos électriques est un secteur économique à développer et à solidifier. « La forte mobilisation des partenaires des secteurs industriels et de la recherche constitue également un atout important, compte tenu du fait qu’elle contribue à l’émergence et à la réalisation de projets concrets de fabrication de véhicules électriques de toutes natures (voitures de promenade, autobus urbains et scolaires électriques, motos électriques, etc.) ou de leurs différentes composantes ».
Déjà, le Québec dispose d’une base industrielle forte en transport terrestre (650 entreprises et 31 000 emplois) qui gravite autour des Bombardier Transports, Bombardier Produits Récréatifs, Paccar, Nova Bus et Prévost Car, sans compter de nombreuses entreprises nouvelles de recherche et fabrication de composantes de moteurs électriques.
Enfin, un embryon de véhicules électriques est en développement basé sur des véhicules utilitaires à basse vitesse (Kargo à Alma), des camions électriques de livraison (Nordresa à Laval), des autobus scolaires électriques (E-Lion, à Saint-Jérome), une moto à trois roues (Bombardier Produits Récréatifs à Valcourt), etc.
Le Québec est en position plus que stratégique avec ses technologies et ses matières premières. Précisions ici l’exploitation du lithium (pour les batteries), selon un procédé exclusif non chimique (Nemaska Lithium), celle du graphite pour la technologie révolutionnaire des batteries-carrosserie au graphène (Mason Graphite) et l’expertise de l’IREQ et d’Hydro-Québec. Le Québec possède aussi des gisements de terres rares (qui servent aux aimants des moteurs, malgré que de nouveaux modèles (Tesla) commencent à s’en passer). La Chine possède le monopole de ce matériau pour le moment.
Bref, le Québec a une occasion exceptionnelle de développer un secteur industriel relié à l’électrification des transports, plus particulièrement dans la fabrication de véhicules électriques. L’auto électrique est une industrie à la mesure du Québec. C’est aussi une industrie au carrefour des solutions énergétiques et environnementales de demain. Le Québec a les ressources physiques (mines de graphite, de lithium, alumineries, production électrique) nécessaires, ainsi que les ressources scientifiques et humaines.
« Le Québec au complet consomme 170 térawattheures (TWh). Or ça prend à peu près 3 TWh d’énergie pour chaque million d’autos électriques. » Dans un scénario hypothétique où les cinq millions de véhicules du parc automobile québécois passeraient à l’électricité, leur consommation ne serait donc que de 15 millions de TWh. « Comme notre consommation risque de baisser ou de demeurer la même dans les années à venir, on a l’énergie nécessaire pour répondre à cette demande sans avoir à faire de grands investissements »[25].
En dépit du récent abandon du projet Peugeot-Citroën et Hydro-Québec[26] (2016), plus conventionnel, la fabrication d’une petite voiture électrique à l’intérieur de la niche bien spécifique ci-avant identifiée, pourrait représenter une opportunité pour le Québec. Elle permettrait d’offrir au consommateur québécois et éventuellement à un marché élargi, des véhicules à des prix plus bas, rendant ainsi la voiture électrique plus accessible que celles présentement offertes sur le marché américain. Deux éléments freinent actuellement l’acquisition d’une voiture électrique : les coûts et l’autonomie (nombre de kilomètres avec une charge). Toutefois, cette dernière contrainte est en voie de disparition graduelle.
Il serait opportun de relancer une telle initiative de construction dans cette niche précise, soit en association avec un constructeur existant ou soit par un consortium d’entreprises québécoises. Quelle que soit la formule, le gouvernement du Québec doit collaborer au financement et à la mise sur pied au Québec de ce type d’industrie d’avenir.
Ceci pourrait s’avérer au Québec un véritable déclencheur et virage décisif vers l’électrique en transport des personnes et la réduction du bilan GES associé. L’État doit repenser ses investissements en production électrique vers le transport électrique individuel et collectif, qui est la voie la plus prometteuse en termes d’efficacité écologique, économique et sociale.
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Proposition Alimentation électrique des navires à quai : étendre l’expérience de l’APM à 5 ports du Saint-Laurent.
Transport de personnes et Transport de marchandises (Annexe VI du document TÉQ.
Cible totale de réduction des émissions GES : 35 000 t/an
Coût estimé (sur la base de la répartition du projet de l’APM) : 60 M$. Participation du Québec: 15 M $
État de situation
Le secteur maritime peine à prendre position quant aux émissions de CO2. Il représente plus de 90 % des marchandises acheminées dans le monde. Pourtant, il est le seul à n’avoir ni objectif, ni plan pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et à ne pas être contraint par l’Accord de Paris.
Au Québec, la stratégie de transition énergétique s’est principalement concentrée sur le transport terrestre. Un seul navire aux dimensions de ceux qui naviguent sur la Voie maritime du Saint-Laurent,peut transporter la même quantité de marchandise que 301 wagons ferroviaires ou 963 camions. En matière de stratégie de transition et d’innovation, le Québec a, sur le plan juridictionnel, peu de moyens d’interventions sur l’eau. Il peut toutefois, intervenir sur les périodes d’escales des navires à quai, lesquelles représentent une portion importante dans l’ensemble d’une livraison transatlantique.
Le transport sur le Saint-Laurent cache une assez grande source pollution terrestre. Derrière l’image d’un mode de transport propre, se cache une réalité méconnue : les navires utilisent une grande quantité d’énergie tout au long d’une escale et tout au long des activités de chargements/déchargements de marchandises. En effet, une fois à quai, les navires doivent laisser leurs moteurs en marche afin d’assurer l’approvisionnement en électricité pour certains équipements, tels que des pompes électriques ou l’éclairage et le chauffage à bord. Certains vont utiliser des moteurs d’appoint ou génératrices alimentés au diésel qui émettent eux aussi des gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques. Cette problématique est accentuée dans les régions nordiques où la demande d’énergie sera considérablement accrue en hiver. Cette pollution porte atteinte à la santé des habitants des villes portuaires.
Il faut, par ailleurs, considérer que pour alimenter ces moteurs non équipés de filtres à particules, les armateurs utilisent un carburant peu cher, très chargé en soufre, à 3,5 %, jusqu’à 3 500 fois plus polluant que les voitures.
L’industrie des croisières maritimes et du transport hivernal des marchandises.
Au cours de la dernière décennie, les ports du Saint-Laurent/Saguenay sont devenus de très importantes destinations touristiques en Amérique et la progression du nombre d’escales est en très forte hausse. La saison d’activité s’étend de mai à novembre. En 2018, 158 escales avec 38 navires différents. Les neuf ports d’escales de croisières accueillent annuellement plus de 550 000 passagers et membres d’équipage. La ville de Québec est maintenant classée au troisième rang comme « Meilleure destination croisière au monde ». En 2019, le port accueillera le plus gros bateau de son histoire avec le Meraviglia, lequel compte 5000 passagers.
Cette nouvelle activité industrielle nécessite des quantités toujours plus élevées de pétrole durant toute la période à quai et peut générer une grande source de pollution atmosphérique urbaine.
« Les cinq dernières années, c’était de pire en pire tellement que l’air était devenu invivable. On ne pouvait plus laisser les fenêtres ouvertes à cause des émanations de diésel[27] ».
Véritable « ville flottante », le plus grand bateau de croisière du monde accueille à son bord 7 530 passagers et membres d’équipage. Ses moteurs tournent en permanence pour alimenter les besoins des passagers et faire fonctionner les 25 restaurants, quatre piscines, deux simulateurs de surf et même une patinoire.
Cargos nécessitant de longues périodes de chargement ou de déchargements et navires hivernants
Les ports du Québec sont des ports nordiques. Les navires à quai doivent utiliser de grandes quantités d’énergie, le temps des opérations terrestres. Un pétrolier amarré à Saint-Romuald a besoin de 24 heures pour décharger sa cargaison. Aussitôt l’opération terminée, c’est un autre navire qui vient s’amarrer. La compagnie vient de doubler ses capacités d’amarrage en vue de répondre à la demande de traitement, donc deux navires sont simultanément en « escale active ».
Les navires hivernants, c’est-à-direamarrés sur de longues périodes en saison froide, sont également grands consommateurs d’énergies issues du pétrole.
Navires de la Société des traversiers du Québec et navires de la Garde Côtière à Québec.
Les escales des traversiers du Saint-Laurent sont évidemment de plus courte durée que celles des navires de croisières, mais elles s’étalent sur 12 mois par année et généralement au-delà des 18 heures d’activités par jour. Plus courtes en périodes de pointes, elles s’allongent en soirée et fin de semaines lorsque l’achalandage diminue. À Marseille, « La Méridionale » a électrifié tous ses « ferries » pour qu’ils éteignent leurs moteurs aussitôt arrivés à quai. Au Québec, une telle initiative représenterait, à terme, non pas un fardeau pour la Société des traversiers du Québec (STQ) mais une économie, considérant le prix très avantageux de l’électricité du Québec.
Quant aux brise-glaces de la Garde côtière canadienne, stationnés principalement au port de Québec, ils sont ceux qui sont les plus exposés à de longues périodes d’amarrage à quai avec obligation de laisser les moteurs en marche afin d’assurer l’approvisionnement en électricité pour les équipements et le chauffage à bord.
L’Administration portuaire de Montréal (APM) a initié un premier projet de système d’alimentation à la fois pour les navires hivernant et les navires à son nouveau terminal de croisière; une réduction des émissions de GES de 2 800 tonnes/année.[28]
Un système d’alimentation électrique à quai permet d’éteindre leurs moteurs auxiliaires des navires et ainsi d’utiliser le réseau électrique auquel le port est raccordé. Seuls les navires adaptés peuvent utiliser un tel système, qui est actuellement très peu répandu dans le monde. Mais le Québec disposant de grandes ressources électriques peut faire office de chef de file à ce chapitre.
Le gouvernement du Québec doit favoriser cette pratique innovante, notamment en soutenant l’installation de systèmes de distribution d’alimentation électrique pour les navires à quai et ce, dans certains ports québécois, particulièrement ceux situés à proximité de zones urbaines. Soit, Montréal, Québec, Trois-Rivières, Saguenay, Baie-Comeau, Havre Saint-Pierre.
PROPOSITION : MATÉRIAUX DE REVÊTEMENT DURABLES
Stratégie de bâtiments durables. (Les numéros font référence à l’annexe VI du document TÉQ).
Proposition 1: Construction résidentielle: Élimination graduelle des revêtements à composantes de pétrole
Cible de réduction des produits pétroliers: IND.
Cette proposition concerne les mesures 49, 53, 54, de Bâtiments résidentiels du plan directeur en transition, innovation et efficacité énergétiques du Québec 2018-2023.
État de situation
Le bardeau d’asphalte utilisé par la très grande majorité des constructeurs de bâtiments est un produit de « bitume oxydé qui fait appel à des combinaisons complexes de composés organiques à haut poids moléculaire contenant une proportion relativement élevée d’hydrocarbure. Il s’agit de substances résiduelles dérivées de la distillation sous vide à haute température du pétrole ». (Environnement et Changement climatique Canada. Évaluation préalable approche pour le secteur pétrolier asphalte et bitume oxydé. Numéros de registre du Chemical Abstracts Service 8052-42-4, 64742-93-4).
Donnée importante : les bardeaux bitumés et les couvertures en rouleau, les toitures de bitume modifié et les systèmes de toitures multicouches occupent la deuxième place dans l’utilisation du bitume, immédiatement après l’asphaltage routier. (Statistique Canada, 2013).
L’utilisation du bitume et du bitume oxydé pour la fabrication du bardeau bitumé est estimée à 1.15 million de mètres cubes au Canada (2012). Une estimation de 250 000 m3 pour le Québec.
Au Canada, environ 1,25 million de tonnes de bardeaux bitumés et de matériaux de couverture sont rejetées chaque année dans des sites d’enfouissement (CCIC, 2007).
Le revêtement d’asphalte est le moins écologique des matériaux de toitures. Il est peu durable, il commande un entretien récurrent, il a la réputation de craquer, de s’écailler, de se perforer facilement, enfin, de se « peler » rapidement. Contrairement aux promesses de bien des fabricants, le cycle de vie de la marque commerciale la plus réputée n’atteint pas 30 ans comme revêtement de qualité, tout au plus 15 à 20 ans, s’il est bien installé. Actuellement, au Québec, les vieux matériaux d’asphalte et gravier ne sont pas recyclés. Ce n’est pas le cas pour les autres types de revêtement (aluminium, métal, bois qui, eux, sont recyclables). De plus, ce produit de revêtement est mal adapté au climat du Québec, alors que les hivers sont de plus en plus caractérisés par des alternances de vents violents (arrachage plus fréquents), de verglas (gondolement et craquage) et de chaleurs plus élevées.
Finalement, pour plusieurs, le revêtement en tuiles fabriqué avec des sous-produits du pétrole tient d’une époque révolue. On doit viser à ce qu’il disparaisse graduellement, comme sont disparus les revêtements muraux (papiers-briques), il y a plus de 70 ans et ce, au profit d’une industrie davantage tournée vers des matériaux exempts de produits pétroliers.
Le temps d’une stratégie de transition est maintenant arrivé. Cette dernière va de pair avec l’objectif du Québec de réduire de 40 % sa consommation de pétrole d’ici 2030. Qui dit réduction de consommation, dit réduction de raffinage et diminution de produits dérivés.
Quant aux membranes de pellicules de feutre à base de pétrole pour toit plat et autres types de membranes – TPO, EPDM-, le même diagnostic s’impose. En plus, il faut tenir compte que les papiers-feutres ont un impact non seulement en fin de vie : il faut, en effet recourir au propane pour chauffer l’asphalte à épandre entre les couches.
Deux matériaux alternatifs proposés
1) La toiture métallique.
Elle était déjà obligatoire en milieu urbain aussi loin que sous le Régime français. Elle a atteint son apogée de popularité dans les années 1930. La feuille métallique est un matériau incombustible et écologique sous deux aspects: elle peut être recyclée en fin de vie; elle peut être fabriquée à partir de matériaux recyclés.
Pouvant résister plus efficacement aux intempéries ainsi qu’aux variations de température, sa durée de vie atteint facilement le double et le triple de celle du bardeau d’asphalte. De plus, le matériau ne nécessite pratiquement aucun entretien, sa texture favorise le glissement de la neige. Certains types de tôle, d’acier ou d’aluminium cadrent avec la tradition architecturale du Québec : tôle pincée, « tôle à la canadienne ». Prix au pied carré : 16-26 $.
2) Le bardeau fait de pneus recyclés.
Ce matériau comporte lui aussi de nombreux avantages sur le plan écologique. Bien que fabriqué de dérivés du pétrole, son intrant principal provient à 95 % de matières recyclées, dont 75 % proviennent de pneus recyclés. On calcule qu’il faut entre 600 et 1000 pneus usagés pour faire un toit.
Contrairement au bardeau d’asphalte, ce produit se conjugue avec la cible de réduction globale du raffinage du pétrole pour les prochaines décennies. Prix au pied carré : 7.50-9.50 $
Il existe d’autres types de matériaux pouvant remplacer le bardeau d’asphalte, tels le bardeau de cèdre, la tuile de terre cuite, la tuile d’ardoise et maintenant, de nouveaux composites. Toutefois, pour fin de cette proposition, nous ne retenons que les deux précédemment décrits, compte tenu de leur adaptation plus évidente au climat québécois et en raison de leurs prix plus concurrentiels.
Proposition de programme gouvernemental visant à initier une transition vers des matériaux alternatifs aux revêtements issus de produits pétroliers.
Considérant le prix d’achat au pi2 pour les deux matériaux alternatifs retenus comparé à celui du bardeau d’asphalte (3-4 $ pi2) il faudra un incitatif financier si on veut initier un mouvement de transition. Il est proposé un programme de subvention ou de crédit d’impôt dont le montant serait en fonction de l’écart de prix à combler.
Les règles d’attribution seraient les mêmes que pour le programme Rénovert, avec un plafond maximum de remboursement de 8 000 $par habitation admissible.
Budget proposé pour une première période d’expérimentation du programme (années 2020-2023 : 50 000 000$
Responsable du programme : Société d’habitation du Québec ou Transition énergétique du Québec.
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[1] FRANCOIS BOURQUE, Le mythe d’un troisième lien à l’est, Le Soleil, 25 aout 2018.
[2] https://www.journaldequebec.com/2017/05/01/le-troisieme-lien-ne-reglera-rien
[3] https://www.journaldequebec.com/2018/08/27/le-troisieme-lien-risque-denuire-au-tramway
[4] CMQ, Portrait statistique 2016 de la Communauté métropolitaine de Québec, novembre 2018, p.15.
[5] MINISTÈRE DES TRANSPORTS MOBILITÉ DURABLE ET DE L’ÉLECTRIFICATION (Direction générale), Transporter le Québec vers la mobilité, politique de mobilité durable – 2030 Plan d’action 2018-2023, 2018, p. 46.
https://www.transports.gouv.qc.ca/fr/ministere/role_ministere/DocumentsPMD/PMD-plan-action.pdf
[6] MASSICOTTE BENOIT ing, Étude de faisabilité technique et des couts sur le cycle de vie d’un tunnel entre les villes de Lévis et Québec, Ministère des Transports de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports et École Polytechnique de Montréal, rapport final et révisé du 9 septembre 2016, pp. 85-87.
[7] GOUVERNEMENT DU QUÉBEC, Bureau de projet sur le 3e lien Québec-Lévis, Implantation d’un bouveau lien routier entre Québec et Lévis, Rapport des faits saillants, 14 aout 2018.
[8] VILLE DE QUÉBEC, Réseau structurant de transport en commun, 16 mars 2018.
[9] PARLEMENT DU QUÉBEC, Projet de loi no 76, Loi modifiant principalement l’organisation et la gouvernance du transport collectif dans la région métropolitaine de Montréal, mai 2016.
https://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=5&file=2016C8F.PDF
[10] CHAIRE DE GESTION DU SECTEUR DE L’ÉNERGIE, 2019, État de l’énergie au Québec, Montréal HEC, décembre 2018, p. 28-31.
https://energie.hec.ca/wp-content/uploads/2018/12/EEQ2019_WEB.pdf
[11] IBID., p. 30.
[12] En 2017, le Québec importait pour 13,1 milliards $ de voitures et camions légers et pour 8,2 milliards $ de pétrole.
[13] CHAIRE DE GESTION DU SECTEUR DE L’ÉNERGIE, Op. cit., p. 13.
[14] ASSOCIATION DES VÉHICULES ÉLECTRIQUES DU QUÉBEC, https://www.aveq.ca/meacutedias.html
[15] https://www.aveq.ca/actualiteacutes/statistiques-saaq-aveq-sur-lelectromobilite-au-quebec-en-date-du-31-mars-2018-infographie
[16] MIA RABSON, Le Canada rate sa cible sur la vente de voitures électriques, La Presse, 7 janvier 2019.
[17] ASSOCIATION DES VÉHICULES ÉLECTRIQUES DU QUÉBEC (AVÉQ).
[18] Pierre LANGLOIS, Acheter un VÉ, un geste vert ou pas ? Partie 2, 12 avril 2018. https://roulezelectrique.com/ges-ressources-cobalt-terres-rares/
[19] Paul-Robert RAYMOND, Pierre Langlois, auteur de Rouler sans pétrole : pour la sauvegarde de la planète, Le Soleil, 3 janvier 2009, https://www.lesoleil.com/actualite/environnement/pierre-langlois-auteur-de-rouler-sans-petrole-pour-la-sauvegarde-de-la-planete-bea15fdbd1a1b200123d6400d0c77dc7
[20] Daniel BRETON, Améliorer notre santé grâce aux véhicules électriques, Journal de Montréal, 2 janvier 2019, https://www.journaldemontreal.com/2019/01/02/ameliorer-notre-sante-grace-aux-vehicules-electriques
[21] Loïc CHAUVEAU, Des deux roues bien fumants!, Sciences et Avenir, 6 décembre 2017.
[22] Laurie NOREAU, Des motoneiges « vertes » bientôt sur le marché, La Presse+, 9 avril 2017. https://plus.lapresse.ca/screens/05123bbd-2b26-4f11-b8b9-c5d7a83fd70a__7C___0.html
[23] MINISTÈRE DES TRANSPORTS DU QUÉBEC, Propulser la Québec à l’électricité, Plan d’action en électrification des transports 2015-2020, Québec, 2015, p. iii.
[24] GERMAIN GOYER, La nouvelle voiture de GM ne coûte que 6700 $, Journal de Québec, 8 août 2017.
[25] Gilbert LAVOIE, Entrevue avec le PDG d’Hydro-Québec : De l’énergie pour 5 millions de véhicules, Le Soleil, 22 février 2017, p. 16.
[26] Pierre COUTURE, Projet d’autos électriques avec Citroën : Québec tourne le dos à une usine de 600 M $, Journal de Québec, 21 février 2018, https://www.journaldemontreal.com/2018/02/21/projet-dautos-electriques-avec-peugeot-citroen-quebec-tourne-le-dos-a-une-usine-de-600m
[27] Nataly RAE, résidente de Québec. Les effets indésirables du va-et-vient des bateaux de croisière, Ici Radio-Canada, 5 octobre 2018.
[28] Croisières du Saint-Laurent, Communiqué, 31 juillet 2015, https://www.cruisesaintlawrence.com/FR/communiques/356/Port-de-Montreal-installation-dune-alimentation-a-quai-a-la-gare-maritime-pour-les-navires-de-croisiere-et-pour-les-navires-hivernants.aspx